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Un "plan vélo" tout sauf vélorutionnaire (CP du 11 mars 2014)

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Paris, le 11 mars 2014 : communiqué de presse de Vélorution suite au comité de pilotage "PAMA" du 5 mars (copie ici du communiqué de presse et du dossier de presse du ministre délégué aux transports).

Des annonces très décevantes

Depuis des dizaines d’années, la France aggrave son retard en matière de développement du vélo comme mode de transport. Les annonces du Ministre délégué aux transports le 5 mars dernier ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Elles sont même très décevantes à cause

  • d’une part de l’absence de remise en cause du tout-voiture ;
  • d’autre part de l’ignorance du terrain associatif.

Quant au communiqué de presse du ministère, il met en avant l’annonce de mesures qu’il faut bien appeler des gadgets : des "invitations" (seulement) aux municipalités à baisser la vitesse en ville ou aux entreprises à indemniser les déplacements en vélo, de qui est déjà tout à fait possible… Aucun engagement fort à changer lois ou règlements, on est dans le flou de bonnes intentions.

Vélorution réclame une véritable écoute et un véritable suivi des demandes de toutes les associations cyclistes, une libération effective de l’espace urbain et routier pour les déplacements à vélo, et une réelle politique d’incitation pour les automobilistes et motards à se séparer de leur engin motorisé.

En tant que collectif militant depuis dix ans pour la cause du cycliste urbain, Vélorution a des demandes à soumettre au ministère. Par exemple…

Pour un véritable partage de l’espace public

<< Axe 2 : Partager l’espace public et sécuriser les modes actifs - Le développement des modes actifs nécessite des infrastructures cyclables et piétonnes sécurisées et agréables les éloignant de la circulation automobile […] >> [extrait du dossier de presse du ministère]

La place dévolue à la voiture et aux deux-roues motorisés n’est pas remise en cause par le ministère. Le vocabulaire est atterrant : plutôt que d’agir sur le danger lui-même, on va "sécuriser" les piétons et cyclistes, qui sont de fait considéré·e·s comme des gêneurs ; la voiture reste reine, les vélos doivent être mis à l’écart.

Aujourd’hui, la conception de tout aménagement cyclable rencontre une montagne d’obstacles : il faut mettre des feux ici, telle signalisation là… De tels aménagements spécifiques coûtent chers et les discussions entre associations et municipalités au sein des comités vélos (ou équivalents) débouchent trop souvent sur des impasses budgétaires (masquant souvent aussi une mauvaise volonté politique). Pourquoi le ministère veut-il faire croire que ce qui n’a jamais fonctionné depuis des dizaines d’années serait soudain devenu la bonne solution, surtout en période de restrictions ?

Il faut donc changer de point de vue en montrant que les voitures et les deux roues motorisés sont indésirables en ville. Et, par respect de l’échelle de fragilité, revenir à une situation où les trottoirs sont réservés aux piétons. C’est toute la chaussée dans toutes les rues qui doit être un aménagement cyclable. Les voitures et les deux roues motorisés ne devraient être autorisées que sur quelques pistes motorisables avec une vitesse très fortement diminuée, limitant ainsi la pollution et permettant à plus de cyclistes débutant·e·s de se lancer. (Ces mesures pourraient même être étendues en dehors des agglomérations.)

En effet, les contraintes devraient peser non pas sur les piétons et les cyclistes, mais sur les engins dangereux par leur vitesse et leur pollution. Diminuer très fortement la vitesse motorisée pour faire en sorte que l’espace public soit véritablement partagé et la pollution diminuée : voilà qui serait une véritable avancée !

Pour de vrais objectifs de lutte contre la pollution

La pollution est un problème de santé publique qui doit être pris au sérieux. Dans les agglomérations, l’espérance de vie de toutes et tous est diminuée de plusieurs mois à cause de la pollution atmosphérique (6 mois à Paris). Les pics de pollution sont de plus en plus fréquents (sans qu’aucune mesure ne soit prise). De plus en plus de personnes sont touchées de plus en plus jeunes par des maladies respiratoires de plus en plus graves.

Le ministère doit clairement lier la promotion du vélo avec la lutte contre la pollution, qui, de fait, passe obligatoirement par une diminution de la place accordée aux engins motorisés. Or, en l’état actuel du dossier, cet aspect reste anecdotique.

Et au-delà, tout plan vélo doit montrer que transports et pollution associée sont liées à l’aménagement du territoire. C’est en limitant le besoin de se déplacer qu’on limitera le plus efficacement le recours aux voitures et deux-roues motorisés. Tant qu’on continuera à favoriser les aspirateurs à voitures que sont les centres commerciaux, les complexes cinémas ou la constitution de zones spécialisées, on augmentera le nombre de voitures et la pollution. Alors qu’en relocalisant et dispersant les activités, on agit réellement sur la source du problème des déplacements et de la pollution.

Le vélo, facteur de cohésion sociale et créateur d’emplois solidaires

L’<< Axe 3 : Valoriser les enjeux économiques liés à la pratique du vélo >> [extrait du dossier de presse du ministère] ne fait que survoler le travail mené par de nombreuses et nombreux bénévoles sur tout le territoire. Leurs associations et collectifs favorisent les liens sociaux à travers le recyclage des vélos, l’animation d’ateliers coopératifs de réparation et d’entretien, et ce dans des locaux trop souvent précaires ou dans la rue. Et certaines associations créent des emplois à travers ces activités. Ces associations ne souhaitent pas être contrôlées mais véritablement aidées par les collectivités locales, avec des locaux notamment. À Paris par exemple, il devrait y avoir au moins un atelier de d’autoréparation associatif par arrondissement afin que le plus grand nombre d’usagers puissent y avoir facilement accès.

Les travaux du PAMA doivent se poursuivre en lien avec ces associations et dépasser largement le cadre technique (aménagements, télématique) et le cadre économique (en fait peu décrit dans ce premier compte-rendu) pour aborder les aspects sociaux et environnementaux liés au développement du vélo.

Conclusion provisoire

Les cyclistes urbains ne veulent pas s’adapter au tout-voiture et se soumettre à des aménagements tortueux et incohérents. Les cyclistes veulent pouvoir faire partie intégrante du trafic, devenir le trafic.

L’espace urbain appartient à toutes et à tous, et les pouvoirs publics ont le devoir de rendre possible son utilisation par toutes et tous dans de bonnes conditions. Si les voitures, les motos et les scooters sont un danger - et c’est bien le cas, pour les corps, les poumons et les esprits -, alors les politiques publiques doivent avoir pour objectif clair et constant de limiter leur nocivité et donc leur nombre.

Or, à cet égard, le « Plan d’actions pour les mobilités actives » (PAMA) diffusé le 5 mars est un catalogue d’intentions timides. Son ambition doit être sérieusement revue à la hausse et déboucher sur des mesures concrètes et audacieuses.